JdR

SotDL, démoniaque ?

C’est l’histoire d’un tentative d’hypnose.

J’aurais mis un certains temps a gérer la possession du Seigneur Démon. Mon premier accueil de Shadow of the Demon Lord fut emprunt de sympathie et de reconnaissance du travail accompli avec en fond une petite musique lancinante : « viens à moi, viens à moi ».

Au premier regard, quelques légers détails suffirent à me faire regarder l’objet avec plaisir mais sans envie de le mettre en œuvre. Mais toujours la petite musique « viens à moi, viens à moi ».
Puis les suppléments commencèrent à pleuvoir. Parmi eux, de nouveaux archétypes permettant d’affiner la création de départ des personnages au rang de novice entre les niveaux un et deux. Et la musique, plus forte, plus concrète avec l’oeillade du Seigneur Démon tapis derrière chaque note. Cela allait-il suffire à concrétiser mon adhésion et me faire basculer du côté démoniaque ?
Allégeance ou rébellion ? Possession ou Exorcisme ? Réponse à la fin de la page.
Et pour y arriver un format « liste des courses » qui va droit au but.

Alors Seigneur Démon, c’est quoi Shadow of the Demon Lord (SotDL) ?

  • Un JdR de Schwalb. Mais qui est ce Schwalb ? Voyez la traduction d’une partie de sa bio sur le GROG
  • Globalement l’homme a frayé en tant qu’auteur avec du D20, du D&D, du Warhammer, du Trône de fer, la Compagnie Noire, Numénera, The strange, Star Wars… Hum, Hum. Ca en dit long non ? De tout cela on retrouve les influences dans SotDL.
  • Le genre : du « médiéval fantastique sombre tendance renaissance et steampunk ».
  • SotDL convoque les influences de Warhammer, Midnight, The Witcher/Salomon Kane, D&D gritty, La Compagnie Noire, Oberron, OZ
  • Le pitch : le Seigneur Démon approche du mon de RÛL. Les échos de son arrivée plonge Rûl dans un bain d’apocalypse infernale mélangeant chaos, démons et autres horreurs déviantes. C’est un début de fin d’un monde !
  • – Le style de jeu est donc sombre, désespéré, noir, glauque, sacrificiel, violent, démoniaque tout en étant héroïque, baroque, foisonnant avec une fantaisie classique détournée à la mode Schwalb.
  • Le système est simple à jouer et à maîtriser avec une mécanique unitaire : 1D20 couplé le plus souvent, en fonction des talents des personnages, ou de la difficulté, à un malus/bonus de 1 à 6 issu de xd6 nommés Boon ou Bane.
  • On doit dépasser un niveau de difficulté avec le résultat du d20+ les malus/bonus + les bonus de caractéristiques + le résultat des dés Boons ou Banes induits par la situation, l’adversaire et ou les talents du personnage.
  • Un personnage n’est définit que par quatre attributs (force, agilité, intelligence, volonté) sur une échelle de 1 à 20 ; et par quatre caractéristiques dérivées (santé, défense, perception, équilibre mental).
  • Les bonus d’attributs sont hauts. Il suffit d’appliquer -10 à son attribut pour obtenir le bonus (Dex de 15 donne donc un bonus de +5 mais également une défense de 15 sans armure).
  • La défense maximale est de 25.
  • A noter : les armures imposent le niveau de défense au delà du cuir bouilli. C’est à dire qu’avec une DEX de 16 la défense est de 16+2 avec un cuir bouilli ou de 16 avec de simples habits. Mais cette même défense est ramenée d’office à 13 avec une brigandine, ou à 18 avec une plate complète, cela sans tenir compte de la DEX. Les petites DEX auront donc tout intérêt à porter des armures lourdes en espérant que le niveau de leur force suffira à leur éviter un malus (bane). L’armure ne réduit pas les dégâts dans ce système. Elle adresse la défense, un point c’est tout.
  • Les personnages joueurs évoluent du niveau 1 à 10(niveau 11+ dans les suppléments)
  • Le système de création de personnage se base sur des carrières encore nommées des « voies » professionnelles. Tous les personnages seront au terme du niveau 3 bi-classés et au terme du niveau 7 tri-classés. Chaque nouvelle voie professionnelle apportant une évolution des attributs et caractéristiques plus des talents (les feats de D&D).
  • Les voies professionnelles sont réparties en trois catégories : novice, experte, et master
  • Originalité : chaque voie professionnelle propose une évolution selon des niveaux particuliers. Ainsi une voie novice offre des talents aux niveau 1,2,5,8 ; une voie experte aux niveaux 3,6,9 ; une voie master aux niveaux 7 et 10.
  • Un niveau légendaire de 11 et plus est proposé dans un des compagnons. Les niveaux 11 et plus ne suivent plus une voie mais une liste de capacités spéciales qu’il faut choisir au rythme d’une capacité par niveau supplémentaire au delà du niveau 10.
  • L’une des forces de SotDL tient dans le nombre incroyables de voies professionnelles. Le livre de base propose 4 voies de novices, 16 voies d’expert, 64 de master. Cette base base de jeu a sa propre faiblesse. Seulement quatre voies de départs jusqu’au niveau 3 rappelant le pur esprit des premiers D&D. Seize seulement en expert tandis que l’inflation touche la catégorie master mais il faudra attendre le niveau 7 pour s’en amuser.
  • Il faut chercher dans les nombreux suppléments pour se retrouver avec un panel de voies professionnelles tout simplement hallucinant.
  • Au total à ce jour l’ensemble des écrits rassemble 30 classes de novices, 67 classes d’expert, 121 de master. Soit 219 voies professionnelles à combiner sur les 10 niveaux. Plus la mécanique Légendaire au niveau 11+
  • SotDL est donc un terrain de jeu parfait et pour les joueurs appréciant le minmax et les builds efficaces et pour les joueur très rôlistes qui incarneront leur triptyque professionnels.
  • SotDL propose des peuples originaux à jouer : gobelins, changelin, clockwork ( des constructions animé par une âme), en plus des classiques humains, nains et orques. Eh oui pas d’elfes !
  • Les compléments ajoutent notamment les faunes, les halfling, et une douzaine d’autres possibilités ! (ferren, naga, sylph, gnome, warg, vampire…)
  • La progression est donc rapide et constante car chaque niveau propose toujours des points supplémentaires à répartir soit dans des attributs soit dans des caractéristiques. La santé reçoit selon la voie choisi un nombre fixe de Points de Vie. Un tri-classé pur guerrier (guerrier-combattant-gladiateur) obtiendra 5 pv par niveau ; soit +50 au niveau 10. Un pur magicien (magicien-sorcier-arcaniste) aura cumulé +20 points de vie au niveau 10. L’inflation est donc contenue, évitant les sacs à PV (sauf pour le bestiaire).
  • Concernant la magie : les sorts ont 11 niveaux de 0 à 10. Ils sont organisés par traditions (en fait des thèmes comme air, malédiction, bataille…). Chaque tradition se réfère à un attribut (soit volonté, soit intelligence). Classique donc.
  • Le nombre de sorts est fonction de la caractéristique POUVOIR du jeteur de sort et non véritablement du niveau, bien que le pouvoir évolue tout de même avec les voies professionnelles.
  • Les sorts ont des pré-requis très classiques. L’ensemble du système de magie est simple mais complet, clairement présenté tout en demeurant très classique. L’évolution de la puissance se fera au travers du cheminement des voies professionnelles.
  • Revenons à la création des personnages. C’est rapide car basé sur les archétypes raciaux. Le plus amusant reste cependant les tables d’historiques, de religions, de personnalité, d’apparence et de physique ou d’age. Amusant également la progression des peuples au niveau 4. C’est artificiel mais après tout SotDL adore la logique de niveau.
  • L’univers : c’est glauque, violent, démoniaque, presque chtonien et il y a de quoi faire sans trop forcer son imagination. Mais oubliez les petits poneys colorés ou les modules pulp fantaisie !
  • C’est un jeu à santé mentale et corruption. Les personnages auront de nombreuses occasions d’attraper des folies et autres déviances. Les mécaniques sont efficaces renforçant le côté extrêmement gritty de l’ambiance.
  • Boon et Bane forment une mécanique simple sans prétention. Peu importe le nombre de D6 accompagnant le D20. Il s’agira de prendre le plus fort et d’oublier les autres pour l’ajouter (boon) ou le soustraire (bane) du D20. Ca fonctionne très bien.
  • Pas de compétences comme pour DCCRPG par exemple. Métiers, historiques ou voies professionnelles induisent logiquement les possibilités du personnage.
  • Toujours dans l’esprit DCCRPG, les persos peuvent commencer au niveau 0
  • La maquette, les illustrations sont réussis. Le tout-en-un du Livre de base se place sur le podium du genre non loin de Warhammer.

Tout est là pour me charmer … mais voilà … mon jet de résistance mentale a repoussé la possession. 
Car cela cloche par endroit.

  • Bon ! Tout d’abord la petit odeur sulfureuse de Warhammer plane sur le territoire de SotDL. Le côté Renaissance avec une touche de steampunk, les professions/voies simple ou avancé, le chaos et les démons…
  • Des dizaines de voies professionnelles à profusion mais la répartition par niveau limite grandement le plaisir du tri-classé. Le plus grand nombre de voies se trouve en effet dans le troisième tier de la progression. Il faudra donc patienter et user ses guêtres dans des aventures de niveaux, nivelées donc, avant d’atteindre les voies de master. Personnellement, je trouve qu’il est nettement plus amusant de partir avec un tri-classé à la mode D&D ou COF dés la création. Cela donne du corps et de l’épaisseur rôlistique au personnage.
  • Ca reste un jeu à niveau ! Et donc a progression coordonnée qui cadre les histoires et leur niveau de puissance comme dans un jeu vidéo.
  • Il y a des combos qui peuvent massacrer un scénario ou laisser des personnages sur le côté. Inversement il y a des combos-roleplay qui s’ennuieront dans nombre de scénars officiels.
  • On dit souvent que SotDL est plus flexible qu’un D&D : poudre au yeux à mon avis car de nombreuses professions ont du mal à se caler dans son univers un peu fouillis, façon puzzle de PDF à 2 euros, en raison des descriptions dispersée dans de nombreux suppléments.
  • Une noirceur permanente qui finit par tourner en rond. Le tout est très bien écrit, mais difficile de voir la lumière de l’espoir.
  • Trop de suppléments ajoutant trop de mécaniques. La complétude est finalement trop fragmentée en terme de production (déjà deux compagnons).
  • Schwalb devrait ouvrir son esprit à des co-auteur !
  • C’est quoi ce système d’écran PDF ?

Voilà c’est l’histoire de la mariée qui était trop belle. Une danse et puis on retourne au buffet.


Conclusion d’un rescapé de la possession démoniaque.

Shadow of the Demon Lord est tout de même une réussite tout en étant un miroir aux alouettes
Swchalb a produit un travail remarquable de synthèse. Il est allé chercher les meilleures idées de droite et de gauche, il a dégraissé les systèmes des ténors du moment, construit un univers fourre-tout à forte potentialité et n’a cessé de produire du contenu. 
Mais voilà, je trouve personnellement qu’il arrive après la bataille tout en commettant de petites erreurs dans le livre de base, corrigées par un trop plein de suppléments. 
Selon moi, une Version 2 compilant le meilleur des suppléments (notamment l’approche des voies différenciées dés le niveau 1), adossée à un supplément décrivant le monde d’Url serait la meilleure chose à venir pour éliminer les défauts de la première mouture.