SAVAGE WORLDS ADVENTURE
Le nouveau Savage Worlds (SW) a depuis quelques mois terminé sa mue suite à une longue période d’analyse des retours de ses fans.
Pinnacle a pris son temps.
Le résultat est plus qu’à la hauteur pour cette nouvelle version nommée « Adventure ».
Petit historique
Avec Adventure on compte à ce jour cinq révisions des règles.
- Version 1 : première impression de SW en 2003
- Version 2 : dés 2004 une seconde édition révisée voit le jour
- Version 3 : 2007 les choses sérieuses commencent avec l’Explorer’s Edition qui installe un ensemble de règles retravaillées et plus solides à un prix concurrentiel.
- Version 4 : 2011 la version deluxe s’impose comme la plus aboutie avec quelques révisions mineures qui affinent les mécaniques. La présentation et la maquette monte en gamme comme le prix…
- Version 5 : 2012 les errata de la 2011 sont incorporés.
- Version 6 : 2018 -2019 Adventure est une nouvelle édition apportant de nombreux changements notables pour en faire la nouvelle version de référence.
FRANCE
En France, SW pointe le bout de son nez en VF par l’intermédiaire de son système géniteur en la personne du jdr Deadland qui pose les bases de l’utilisation des cartes à jouer, des jetons, ou des valeurs de dés. Nous sommes alors en 1997.
Il faudra attendre 2012 pour que la version SW de Deadland débarque en VF incorporant les règles de bases.
Un an plus tard, l’éditeur BBE propose dans la foulée la VF de SW Deluxe et gratuitement un extrait du livret des joueurs.
Jusqu’en 2017 rien ne se passe vraiment pour la gamme traduite. A l’inverse, en VO la production à base de SW conserve un rythme impressionnant avec dernièrement une version RIFT inespérée tandis que les éditeurs tiers proposent des univers de qualité et que les fans alignent les adaptations sans faiblir.
A tel point que SW maintient sa position parmi les leaders des VTT type FG ou Roll 20.
Malgré cela, en France le succès de SW est, me semble-t-il, plutôt honorable sans pour autant, d’après ce que j’ai perçu sur les forums, être pas à la hauteur des espérances de l’éditeur Black Book Edition qui pourtant maintient son louable effort sur la durée.
Le sauvetage de la traduction d’Interface 2.0, les adaptations des campagnes Anathazerin et Invincible, ou la qualité du coffret Beasts & Barbarians et, dans une moindre mesure, de celui de Lankmar tentent de soutenir la promotion de ces règles génériques.
Mais ce n’est pas sans difficulté. L’excellent B&B s’est heurté dés sa sortie à la concurrence du non moins excellent Barbarian of Lemuria VF, tandis que le choix de la version SW Lankmar – reconnue comme un peu faible – n’était pas des plus judicieux en regard de la qualité d’autres produits du type Heroic Fantasy en SW (Shaintar,Hellfrost...).
De même, le fait que les conversions des campagnes Chroniques Oubliées Fantaisie et H&D ne soient pas encore disponibles (mi 2019) à l’achat mais uniquement destinées aux pledgeurs semble contre-productif.
Pourtant, BBE ré-imprime, au moment d’écrire ces lignes, les règles de base, et prépare le supplément Super Héro après la belle traduction du supplément SF.
Sans parler de Deadland qui poursuit une belle carrière. BBE est donc devenu le porteur de lumière, principal promoteur de SW auquel un Achtung Chtulhu ou l’adaptation pour Fragged Empire s’adossent dans le même esprit.
Mais pour autant, sur les forums JdR français en vogue, SW demeurent assez discret comme cantonné à ses fans de la première heure.
Ses détracteurs, quant à eux, réfutent le plus souvent son côté fun, fast and furious arguant que leurs systèmes préférés sont aussi rapides que SW ou que SW n’est pas plus véloce, c’est selon. Sans compter que le système de blessures ne rencontre pas le succès des points de vie toujours très apprécié dans le landerneau français des joueurs de « JdR classique ».
Et puis, il faut bien l’avouer, la France n’a jamais vraiment porté aux nues les systèmes génériques. Gurps n’a pas survécu, Fate vivote tranquillement, PbTa connait son quart d’heure de gloire, FU reste underground, etc… Le petit dernier, F.A.C.E.S, s’inspirant très fortement de certaines mécaniques de SW semble quant à lui pouvoir connaître sa petite heure de gloire, enfonçant encore un coin dans la prospérité hexagonale de Savage Worlds.
Et pourtant, peut être que le messie vient d’arriver.
La nouvelle version de SW frôle la perfection. Ses optimisations l’inscrivent et la synchronisent avec l’air du temps. A savoir, une très fine touche de narrativisme, des simplifications de règles, des options pour accélérer encore le Fast existant, moult réglages rendant le jeu encore plus souple et Fun tout en demeurant relativement retro-compatible avec la masse grouillante des suppléments et univers existants.
Cette révision n’est ni commerciale, ni cosmétique, ni de surface. Elle est selon moi assez profonde et améliore considérablement la qualité de jeu. Les réglages sont réellement nombreux : de la simple retouche, à des nouvelles règles plus dynamiques, fluides et toujours faciles à jouer.
Vous trouverez plusieurs site présentant les nouveautés ou les modifications qu’apportent « Adventure » dont un pdf officiel de l’éditeur.
Globalement presque tous les chapitres sont touchés (races, désavantages, traits, compétences, avantages, équipement, combat, pouvoirs, règles générales).
Je retiendrai personnellement
- La disparition du trait secondaire « charisme » au profit d’un edge « charismatic » entraînant de fait une mise à jour d’atouts (edge) et de défauts (hindrance) en rapport. Un trait secondaire qui finalement est totalement dissout à bonne escient pour plus de légèreté et de compacité sans perte d’intérêt.
- Plusieurs bonus ont été ramené à +1 au lieu de +2. Ce n’est pas négligeable et cela permet d’adoucir certains atouts un peu trop puissants à l’usage. Exemple : attractive et very attractive qui passe de +2/+4 à +1/+2.
- Certains edge (atouts) ont été repensés entièrement pour plus de cohérence : exemple Brawler qui passe d’un simple bonus à la compétence de combat à un +1 en résistance et +1d4 en dégât.
- OU précisés et mieux écrits comme ambidextrous qui voit préciser que les parades des armes peuvent se combiner. Ou encore Arcane Background est plus joliment écrit, Bersek plus clair à la lecture avec des effets mis en valeur etc…
- L’ajout d’un chapitre de règles pour du combat rapide. En un round cela permet de résoudre une confrontation. La mécanique est simple à mettre en place. Bien entendu punitive, mais en réussissant à relativiser la prédominance de l’aléatoire.
C’est plutôt élégant et, personnellement, pour gérer une baston de taverne ou une escarmouche de rues, ça me plaît énormément. En même temps rien d’original mais efficace… - Certains peuples proposés dans la base ont été « re-carrossés » pour un meilleur équilibre ou logique. Six au total. A noter que le Half-Orc disparaît de la base.
- Les règles améliorées de création des peuples sont maintenant performantes et plaisantes parmi les plus sympas à utiliser.
- Un point important : de nouveaux états s’ajoutent à la liste de base : distrait et vulnérable. On pourrait croire que cela complexifie le jeu. Mais non ! C’est très bien vu et ajoute, bien au contraire, des opportunités de jeu et de situations.
- Les règles de situation, notamment en combat, connaissent de très nombreuses retouches. L’attaque rapide et la défense complète disparaissent au profit de réglages portés par d’autres situations. La défense passe à +4 par exemple.
Trois nouvelles situations- entangled, bound, stunned – permettent de mettre en jeu les nouveaux états.
Les options du combat montés sont mieux réglées et globalement presque toutes les situations sont reconstruites. C’est là que, selon moi, Adventure est bien plus qu’un petit lifting. Toutes les retouches sur cette partie changent en jeu les effets tactiques ou les effets sur les personnages en combat. - Nouvelles règles de poursuite qui intègrent le jeu de carte à sa juste valeur, lui ajoutant une utilité supplémentaire. Très plaisant à jouer avec son lot de tension et de rebondissement.
- Chamboulement total dans les compétences et à bon escient ! Certaines disparaissent et d’autres apparaissent notamment sur la base de la connaissance. Sans m’attarder, c’est encore une fois bien vu. Le vrai plus c’est la logique de compétences de base en rapport avec le setting : d’office tous les persos les possèdent au niveau d4.
- Anecdotique, l’expérience se libère de la logique de points d’expérience au profit d’un nombre de sessions variables selon la logique de la durée de la campagne. Les passages de « niveaux » sont donc fonction des séances et de la logique de l’histoire. Je préfère.
- L’étourdissement (shaken) n’empêche plus de courir pour une action gratuite de mouvement. On va pouvoir se mettre à couvert.
- Les Hindrances (défauts) subissent pas mal de réglages et effacent Lame et One legged. Il y a plusieurs nouveautés comme can’t swim, clumsy, driven, hesitant, impulsif, jealous etc… pour un total de 16. Le roleplay est poussé en avant avec certains des nouveaux défauts.
- Côté Edge (atouts), même lifting en profondeur avec des annulations et des nouveautés. Adept, Florentine (intégré autrement), Leader of Men, Martial Arts Master, Noble, Quick Draw (intégré autrement) disparaissent.
Pas mal de nouveautés également pour un total de 29 tout de même ! - L’usage des Bennies (jetons) connait de petites améliorations bienvenues.
- La récupération est mise à jour, tout comme les règles d’équipement, d’opposition, d’échec critique…
- Les pouvoirs ne sont pas en reste avec encore une fois des réglages un peu partout, à tous les niveaux.
Et je pourrais continuer longtemps comme cela…
SOYONS donc CLAIR !
Cette nouvelle édition est, selon moi, bien supérieure aux précédentes.
Les changements sont très très nombreux. Bien entendu, il s’agit le plus souvent de réglages mais comme tous les chapitres sont impactés, l’on aboutit à une nouvelle version des règles qui modifie tout de même les effets en jeu.
Certes l’éditeur annonce la rétro comptabilité mais nous avons tout de même 54 pages de conversions mises à disposition. Plus de cinquante pages ! Nous sommes en présence d’un lifting en profondeur ! Les mécanismes de base demeurent mais toutes les finitions bougent, changent, s’améliorent.
SWAd gagne en cohérence, en fluidité, en logique tout en améliorant fortement son côté FAST, FUN & FURIOUS !
On tient là une version fortement expérimentée, ayant écouté les remontées des terrains de jeu, parfaitement digérée les retours des joueurs et MJs, au point qu’à la lecture on se demande comment nous avons pu trouver la précédente édition si parfaite. SWAd monte d’un cran la qualité de son système de jeu.
Tout simplement Un Must Have !
OUI MAIS POURQUOI FAIRE ?
Avec Fate, Genesys, A.G.E, Open Legend ou le Cypher System, SWAd fait parti de mes moteurs prêts à tout.
Mais, pour autant, il ne s’impose pas face à ses adversaires. Ainsi SWAd, sous son air ramassé, est assez crunchy et demande de bien connaître tous les Etats, les Atouts et de suivre les situations de combats au plus juste pour appliquer les règles. Le coeur du système reste facile d’accès pour tout non initié, la maîtrise peut se contenter du doigt mouillé sans trop faire dérailler l’équilibre, mais une des saveurs de SW reste ce petit côté « combottage » nécessitant de bien connaître la base. De plus, la couleur du moteur est Pulp en diable et les personnages craignent peu pour leur peau.
Tout ça pour dire que je ne l’utilise pas pour de l’initiation au pied levé ou une partie sur le pouce avec création de « perso » à la va vite. Je lui préfère une Fate Accelerated par exemple.
Pour de l’heroic fantasy grand écran il manque parfois une peu de substance à la magie mais ça le fait bien dans une ambiance à la Lankmar. Pourtant je lui préférerais pour Lankmar la version DCCRPG. Je reste curieux des adaptations de Anathazerin et Invincible.
Pour de l’horreur, de l’enquête type polar, ou du fantastique je lui préfère un Cypher ou un Genesys.
En revanche, pour du contemporain-action, de l’anticipation ou du cyberpunk, SW me convient très bien. Plusieurs modules Pulp à la Bob Morane se sont parfaitement satisfaits des règles ainsi que du cyberpunk avec Interface 2.0. Vraiment idéal.
Enfin, SW version RIFT excelle à sa juste valeur.
Ceci posé, SWAd reste une excellent moteur facilement adaptable à tous les contextes de jeu (un léger bémol pour le genre super héros). Mais il apportera à n’importe quel univers une saveur Pulp qui peut ne pas coller parfaitement à l’ambiance recherchée.
Niveau : | pratiquant |
Type : | Générique |
Genre : | Générique |
Système : | set de dés sans le d20 |
Simulation : | simulation |
Edition : | Professionnelle |
Maîtrise : | facile mais rigoureuse |
Matériel : | Professionnel |
Substance : | Forte |
Originalité : | Modérée |
PLUS : | des règles rodées et affinées pour cette V6, on peut créer le « perso » de ses rêves, un côté Gurps en plus digeste, pas de points de vie mais des blessures, dynamique dans le combat, combos possibles, possibilité de combats résolus en un tour, un peu de narration partagée (très légères avec les jetons), toujours Fast à maîtriser, Fun à jouer, Furious dans les combats, utilisation d’un jeu de carte à certains moment (ça plait, ça plait pas, c’est selon), maquette efficace, des suppléments en nombre et de qualité, pérenne, des persos solides dés le départ… |
MOINS : | illustration de couverture faiblarde pour cette V6, trop Pulp pour certaines ambiances très particulières si on ne convoque pas les options, mortalités des persos faibles (mais une option létale existe), création de personnages sur le pouce peu adaptée (mais faisable), les combats demandent un peu de rigueur mais restent rapides … |
Ma Note : | 5/5 |