Bonjour, chers lecteurs et lectrices. Nous ouvrons ici le cas du moteur de jeu de Modiphius, disponible en SRD depuis 2023. À partir des enregistrements des séances entre 2d20 et le Docteur THW, nous essaierons de décortiquer la personnalité de ce moteur afin de déterminer la véracité des accusations dont il peut être victime. Faites entrer l’accusé !
2d20 -> Bonjour Docteur.
Docteur THW –> Bonjour 2d20. Alors, qu’est-ce qui vous amène dans mon cabinet de psychanalyste jdr?
2d20 -> Eh bien, comment dire docteur, je me sens mal-aimé… incompris. Pourtant j’essaie de faire de mon mieux. Je tente de diversifier ma personnalité, mes mécaniques, de m’ouvrir à tous. Mais, je sens bien qu’on ne me regarde pas comme on regarde d’autres moteurs.
Docteur THW –> En étudiant votre dossier, j’ai, en effet, constaté que vous prêtiez le flanc à des critiques. D’après ce que j’ai lu, certaines de vos mécaniques font débat. De plus, dernièrement, votre programme « 2d20 World Builders » est sinon critiqué, du moins soumise à comparaison.
2d20 -> Ha, vous voyez !
Docteur THW –> Nous allons parler de cela bien entendu, mais avant laissez-moi vérifier quelques informations pour que nous soyons sur la même longueur d’onde. D’après mes notes, vous vous appelez « 2d20 system« , né Modiphius en 2013. Vous avez donc 11 ans d’existence et de maturation, ce qui est déjà très bien pour un système de règles. Vous avez motorisé essentiellement la gamme produite par Modiphius adossée à des licences prestigieuses. À savoir : Achthung Chtulhu et Cohors Cthulhu, Mutant Chronicles, Conan, Fallout, Star trek, John Carter of Mars, Dishonored, Homeworld, Infinity, Dune, Dreams and Machines, Might & Magic ; et cela n’est pas terminé, j’imagine, puisque le programme World Builder propose aux auteurs tiers de vous utiliser.
2d20 -> En vérité, Mutant chronicles et Conan nous ont quittés ; John Carter, Dishonored et Homeworld ne sont plus suivis, et Dreams and Machines, le petit dernier, n’a pas rencontré un réel succès. Ma force réside avant tout dans Fallout (relancé par le succès de la série), l’iconique Star trek avec une V2 qui vient de naître, la gamme Infinity très solide et connectée aux jeux de figurines. Conan est encore une référence jusqu’à ce qu’un autre éditeur s’empare de la licence… Je vois bien l’ogre Free League).
Docteur THW –> Peut -être, vous faudrait-il déployer la licence Elder Scroll en 2d20 puisque vous avez déjà le board game ?
2d20 -> Qui sait ? Il faut avoir les épaules larges. Mais, vous voyez finalement, tout cela ne m’aide pas à conquérir le cœur des rôlistes.
Docteur THW –> En effet, votre mécanique semble clivante si l’on consulte les nombreux fils d’échanges sur Reddit et autres forums. Et, il est vrai, que Conan semble avoir traumatisé nombre de rôlistes.
2d20 -> Déjà Mutant Chronicles, à son époque, avait surpris par mon approche de la dark symétrie. Mais, pour Conan, c’est notamment la gestion des armes qui est parfois critiquée. Pas que… Mais bon…
Docteur THW –> Oui, j’ai lu deci-delà des rôlistes qui trouvaient la logique d’effet un peu lourde à gérer. Pourtant, on la retrouve dans Savage Worlds par exemple. Cela donne, factuellement, du sens à l’arme utilisée et ajoute une mécanique de personnalisation et de choix.
2d20 -> L’idée, c’est que dans Conan version Modiphius, monde violent, barbare, rude et guerrier, les armes ont leur importance. Dans notre vision de cet univers. Ma mécanique du « dé d’effet » est assez simple puisqu’elle se déclenche au travers des dés de dégâts. En fait, le moteur de Green Ronin, AGE, fait de même avec un déclenchement à partir de « double » et de son dé de stunt. Savage Worlds le propose aussi, avec des notes sur l’équipement, mais aussi les prouesses. FATE se base sur les shift ou la dépense de point fate. En réalité, il n’y a rien de nouveau. Je suis aussi élégant que les autres. Un test de réussite, puis un lancer les d6 pour les dégâts et en lecture directe le déclenchement d’effet à partir des 5 et 6 survenus.
Docteur THW –> Un usage équivalent à la 5e donc.
2d20 -> ben oui, mais avec le fun des 5 et 6 qui poussent des effets. Avec la possibilité d’armes encore plus fortes en faisant varier l’intervalle d’effet sur les dés. Conan, c’est un jeu dans lequel les combats seront fréquents et sanglants : c’est une grande partie de l’esprit des romans. Par conséquent, les armes doivent faire partie d’une telle ambiance et ma mécanique leur donne une vraie légitimité. Le momentum, quant à lui, permet de pouvoir magnifier les scènes d’action ou toute autre séquence. Deux simples mécaniques qui peuvent produire de grandes choses à une table de jeu.
Docteur THW –> Certes, mais justement, c’est « mécanique ». J’ai pu lire le reproche qui veut que cette relative technicité puisse casser la fluidité de la narration, ou du moins ralentir l’immersion.
2d20 -> C’est un fait, de même qu’un parti pris du système. Je suis un moteur semi-complexe qui cherche un entre-deux combinant narration et technique. Ce que l’on me reproche, il me semble et sans vouloir me transformer en martyre, on ne le reproche pas, ou peu, à certains de mes confrères qui pourtant se rapprochent de mon parti pris. Je pense à Savage Worlds par exemple. Il manipule moins de dés, mais est tout aussi crunchy au final. Fate également, en convoquant les aspects pour obtenir des bonus ou malus, fait usage d’une mécanique en surcouche d’une narration pour justement agrémenter cette même narration. Après, j’aime à dire, que nous sommes entrés dans une époque de la tyrannie du simple en termes de mécaniques, voire de l’hyper narration. Sauf que c’est un style de roleplay, pas un dogme. De toutes les manières, prenez le Basic Roleplaying Game, vous pouvez très bien le jouer à l’épure la plus simple, en interprétant la qualité d’un résultat. Tous les systèmes, ou presque – oublions Rolemaster par exemple – peuvent se dégraisser jusqu’à l’os et ne conserver qu’une mécanique de simulation élémentaire qui ne servira qu’à donner une direction à l’imaginaire et la narration. Du Oui/Non binaire et on surajoute dessus le contrôle du MJ ou des participants de la table. Néanmoins, je ne suis pas certain que c’est ce que recherchent tous les rôlistes. C’est pour cela que j’essaie de proposer un pont, certes mécanique, mais je l’espère malin, entre deux mondes. Le monde des wargammers, ou des boardgamers aimant le crunch et les influences ou la lutte contre l’environnement, et le monde des interprètes, des amateurs de figures libres narratives, les troubadours de la parole.
Docteur THW –> Permettez-moi de nous interrompre. C’est le moment, je pense, d’explorer votre mécanique du « momentum » souvent au cœur de clivages sur différents forums. Est-elle mal comprise, mal présentée, détournée de sa fonction première, sous-utilisée dans ses subtilités narratives ? Je crois qu’en parler nous permettrait d’avancer sur votre mal-être.
2d20 -> Ouais le momentum… On me le jette parfois au visage alors que j’en suis assez content. Ce n’est pas une révolution, ni une idée de génie. Je dirais que c’est une mécanique élégante et logique pour matérialiser une réussite critique et donner dans le même temps la main aux joueurs pour exploiter à leur guise le succès. Attention, ce n’est pas le destin ou la bonne fortune, pour cela, j’ai dans mes règles la Fortune ou la Détermination. Le momentum c’est l’excellence. Dans Fate vous avez les shifts, dans Swade les relances, dans le Cypher Sytem le 17-18-19-20, dans Genesys les avantages, et je pourrais en citer d’autres, sans parler du 20 naturel. Tous représentent une exécution parfaite qui apporte un avantage. Vraiment rien de nouveau. Le momentum est pensé comme un critique que l’on a plus ou moins de chance d’obtenir en fonction du niveau de la compétence en jeu. Là où il va un peu plus loin, c’est qu’il est possible de le placer les points de momentum gagnés dans un pot commun utilisable par le groupe. La belle action profitera à l’équipe. C’est un peu la chaîne du succès qui profite à tous.
Docteur THW –> il y a du « Meta » dans tout cela…C’est un reproche que j’ai lu parfois…
2d20 -> Bien entendu comme chez les autres. Le momentum propose à la fois un cadre d’effet, mais aussi avec le pool commun une narration qui pourra être partagée par le groupe. Et le MJ bien entendu. Alors oui c’est une mécanique avec déclencheur, points et jauge. Cela fait très comptable si l’on focalise sur l’aspect cadré et additionnel de la chose. Pourtant, la volonté première est de propulser le narratif avec bien entendu un effet réel et concret en jeu.
Docteur THW –> Permettez-moi de vous interrompre à nouveau. Vous ne traitez pas l’accusation de « Meta » qui, par exemple, est soulignée par l’usage d’un point de momentum par un autre membre du groupe, à un tout autre moment que celui oùce point a été obtenu. Je m’explique : le personnage A crochète une serrure avec maestria et obtient deux momentum qu’il met au pot commun. Vingt minutes plus tard, le personnage B utilise un point momentum de la jauge commune pour améliorer sa passe d’arme. C’est là que porte le fer des reproches. C’est mécanique, sans lien narratif non ?
2d20 -> Je vois. La jauge collective de momentum peut être perçue dans une même scène comme un effet bénéfique sur la lancer de la réussite d’un personnage. Vous crochetez de manière magistrale la serrure et votre compagnon utilise le point de momentum mis en commun pour neutraliser le garde dans la pièce. Dans ce cas, il est facile de narrer comment le crochetage a été exécuté dans un silence parfait, si bien que le garde ne s’est aperçu de rien. En revanche, si le momentum est utilisé plus tard, il faut le voir comme la confiance gagnée par l’équipe suite à diverses réussites. C’est de l’ordre de l’exaltation, du gain de confiance, de croire en sa réussite.Et j’ajoute qu’à chaque changement de scène, la jauge collective doit diminuer d’un point de momentum. Cela simule l’érosion de la confiance partagée après un moment d’hubris. Plus le temps passe, symbolisé en cela par un changement de scène, plus la galvanisation s’estompe. Oui, c’est mécanique, mais ça rend bien compte de l’esprit d’équipe et du va-et vient dans la synergie de groupe. La jauge ne peut pas dépasser 6 points de momentum au final. Chacun verra midi à sa porte. Les amateurs de crunch ou les rôlistes plus techniciens qu’interprètes se retrouveront dans la mécanique, c’est certain. Mais, les rôlistes plus narrateurs que techniciens peuvent utiliser le momentum comme d’un tremplin pour le récit de leurs exploits. Points fate, bennies, momentum ou point d’action ou de héros, c’est du pareil au même. Une gâchette pour exploiter une scène et déployer des effets pré-établis ou imaginés sur le moment avec, certes, selon le contexte, un aspect parfois plus Meta. Dans ce cas, parlons de l’inspiration dans la 5ᵉ de D&D. Tout le monde cri au génie. Or, le momentum c’est aussi de l’inspiration.
Docteur THW –> J’ai l’impression que vous cherchez à attraper tous les concepts des autres systèmes, non ? Ne serait-ce pas cela qui induit une perception complexe de votre approche ?
2d20 -> Vous avez raison sur le fait que j’ essaie de proposer le meilleur des autres motorisations. Je ne crains pas le dire. Chez moi, vous trouverez un peu de l’esprit Fate avec les traits, le 1 ou 20 critique de D&D, des Bennies avec le momentum, mais également des hero point avec la Fortune ou la Détermination ; vous trouverez une liste de compétences ramassées, mais avec la logique de spécialisation avec les focus, la possibilité de reconstruire les attributs ou de carrément s’en passer comme dans le Cortex, des réglages d’ambiance en agissant sur certaines mécaniques, des niveaux d’adversités pour accélérer le combat ou les ambiances ; et surtout, par exemple, comme pour le moteur de Free League, la possibilité de diriger les règles vers une simulation plus simple ou plus précise, et de les adapter à un univers particulier.
Docteur THW –> Hum, et de fait, on vous reproche souvent, dans les productions Modiphius, une présentation des règles touffue des règles. Ne pensez-vous pas qu’un schéma de synthèse pourrait être utile ? Vous n’êtes pas un moteur dédié au novice, ne pensez-vous pas ?
2d20 -> De réels efforts ont été faits dans les dernières productions. Je pense à Fallout qui est plus aéré, clair, imagé, lisible au final. Homeworld également. Et mon SRD propose une version maquettée bien organisée. Je pense que l’on doit encore faire un effort sur la profondeur des signets pour les PDF et réfléchir certainement à une synthèse visuelle des règles. Un peu à la ICRPG par exemple.
Docteur THW –> Oui. Je pense que cela ne pourrait que vous faire du bien. Mais, revenons à cette volonté de proposer le maximum de mécaniques pour un maximum, finalement, de roleplay. Un paradoxe, non ?
2d20 -> …Je n’avais pas vu les choses comme cela. C’est possible. C’est vrai que nous sommes dans un « system does matter ». Comme tous les autres moteurs que je vous ai cités. Mon géniteur Jay Little aime que les dés produisent de l’effet et de l’histoire. Il est le co-créateur du système Genesys à base de Star Wars Edge of the Empire. Je pense qu’il a voulu conserver toutes les possibilités cinématiques d’un Genesys mais avec des dés non spéciaux. Le d20 et le D6 sont les dés les plus usités, donc le 2d20 joue avec eux. Je vous rappelle que l’Oeil Noir lance trois d20… En fait, en tant que moteur de simulation, je pense donner le maximum de possibilités pour jouer comme vous aimez.
Docteur THW –> Précisez votre pensée s’il vous plait ?
2d20 -> Vous voulez des aspects à la Fate ? Ok, prenez les traits personnels pour définir votre perso, puis dans les actions majeures d’une confrontation, la création d’un avantage qui sera un trait de situation et d’environnement positif ou négatif pour la scène, sans parler des traits qui définissent un environnement ou un climax. Vous voulez du Critique, j’ai le 1 et le 20 comme D&D. Vous voulez des spécialisations qui peuvent vous booster vous avez les Focus. Vous voulez des points de hero, vous avez la Fortune. Vous voulez des objectifs personnels ou des conflits, vous avez la Détermination et les Valeurs. Vous voulez des stunt à la AGE, vous avez le momentum personnel ou de groupe. Vous avez simultanément des points de vie (le stress, une sorte d’encaissement) et des blessures qui, elles, seront effectives et limitées généralement à trois comme dans SWADE. Vous avez des options pour introduire la fatigue, modifier le la manière de toucher en combat (soit une opposition de jet de dés, soit une difficulté à atteindre), des règles de poursuite, d’infiltration (abstraite ou pas), du conflit social, du moral, des qualités pour les équipements. Le concept de talents pour personnaliser les personnages, mais aussi trois types de magie ou de pouvoir. La corruption et le hacking sont pris en compte. Même une possibilité d’utiliser un jeu de cartes pour les points de menaces.
Docteur THW –> Je crois que j’ai compris, ça va aller.
2d20 -> Pardonnez-moi, je m’emballe parce que je veux faire de mon mieux. Ce que je veux dire, c’est que je pense être un des moteurs les plus polyvalentes et réglables du marché.
Docteur THW –> Le côté « attrape-tout » participe certainement à l’illusion d’une certaine complexité.
2d20 -> oui…oui…vous avez probablement raison. Au moins cela donne des jeux que j’espère bien adaptés à leur thème et leur ambiance. De plus, la mécanique 2d20 associant simplement deux valeurs permet de jouer avec le nombre d’attributs et de compétences que l’on veut. Même sans attribut si l’on veut. Mon SRD propose 6 attributs généralistes. Cependant, dans le petit dernier, Dreams and Machines, on se base sur quatre attributs. Sept dans Fallout. J’essaie d’être « libérateur » pour les créateurs. Notre projet World Builder va en ce sens.
Docteur THW –> Bien, parlons-en justement. Il y a des critiques sur votre licence, souvent comparé à celle de Free League.
2d20 -> Free League, les samaritains du Jdr. Je sais. Disons que les deux licences ont un même objectif, mais une philosophie différente. Avec le programme World Builder, Modiphius, un peu comme une franchise, inclus une aide promotionnelle, des conseils, une banque d’image ou des kits pour la création et la production de votre JdR, ce qui n’est pas le cas de celle de Free League qui est tout simplement posée sur la table du libre sans limites de commercialisation de produits tiers autour de leur univers. L’aide de Modiphius à la production à un coût qui induit la captation de 10% de la vente du produit sur DrivethruRPG. La propriété intellectuelle reste à l’auteur du moment qu’il n’utilise pas une licence dont Modiphius n’est pas propriétaire pleinement : c’est-à-dire quasi toutes ses licences, puisque Modiphius traite des licences déjà existantes (Jeux vidéo, romans). Pour une création en propre, la propriété intellectuelle reste entièrement à l’auteur.
Docteur THW –> J’entends bien. Le programme a été lancé en 2023. À ce jour, les retours ne sont pas bons. Il n’a pas généré beaucoup de productions de créateurs, si bien que Modiphius n’a pas réellement tenu ses promesses. Pas de suivi régulier, pas de réponse aux mails des créateurs et un taux de satisfaction autour des 60%. Modiphius avance que le coût et l’énergie du programme qu’ils ont imaginé n’est pas rentabilisé par son faible succès. Par conséquent, ils ne s’engagent pas dans les promesses du programme. Pour tout vous dire, j’ai l’impression que le programme est mort-né et qu’il y a un certain déni de cela chez Modiphius. Sans compter certaines obligations ou limitations qui sont plus ou moins appréciées. Peut-on parler d’échec ?
2d20 -> … Sans langue de bois, je le pense et ça ne va pas m’aider. Je sais que les critiques fusent sur les réseaux, surtout après une première année en demi-teinte. J’ignore si Modiphius va rectifier le tir. Il reste clair que le programme appelle une version 2 remaniée sur plusieurs points pour répondre aux remarques et insatisfactions. Mais peut-être y a-t-il d’autres nuages à l’horizon avant de s’occuper de cette mauvaise publicité…
Docteur THW –> Vous pensez à la santé financière de Modiphius ?
2d20 -> Je ne sais pas. Je n’ai pas les chiffres. Mais, c’est un éditeur qui vit en partie sur l’achat de licences, ce qui doit réduire ses marges. La V2 de Star trek semble colorée par l’espoir de faire un gros coup. Un peu comme pour Fallout qui brille encore plus grâce au succès de la série. En revanche, Dishonored, Homeworld n’ont pas rencontré le succès. Leur « Dreams and Machines« , inspiré notamment d’Horizon Zero Dawn, ne semble pas non plus convaincre. En résumé, Modiphius a, en ce moment, trois poids lourds pour promouvoir mon moteur : Fallout, Star trek et Achtung cthulhu… Dune à la marge mais ses réglages systèmes sont critiqués. J’ai parfois, la vague impression qu’un petit déraillement de gamme, par exemple, sur la V2 de Star trek pourrait faire verser leur wagon Jeux de Rôle.
Docteur THW –> Star Trek tout de même : ne soyons pas pessimistes. De plus, Modiphius ne vend pas que des jeux de rôle. Ni plus que des jeux sous 2d20… Bien, nous avons vu le faux-pas du programme World Builder, maintenant revenons à vous. Finalement, dans le marché des SRD, ou plus largement des moteurs de jdr, nous nous accorderons, je pense, sur une définition vous concernant : un système assez cinématographique, à la croisée des bonnes idées de vos concurrents, semi-complexe, avec une méta-monnaie intégrée et incontournable.
2d20 -> Oui…Ça me va.
Docteur THW –> Et votre âme alors, qu’elle est elle ? Chaque grand système a une âme. Plus qu’une personnalité, j’évoque une singularité, une musicalité qui lui est propre au point de transcender les jdr dont il fait système…
2d20 -> …lancer 2d20. Plus sérieusement Docteur, c’est une question qui me remue. Une très bonne question. À bien y réfléchir, je pense avoir une âme composite… Donc, pas d’âme en propre ? C’est peut-être là que le bât blesse pour certains. Je suis une construction de mécaniques et de sous-mécaniques très efficaces et polyvalentes, mais déjà vue ailleurs. Pas spécialement en mieux d’ailleurs, car je pense, sans fausse modestie, avoir raffiné plusieurs concepts existants, les avoirs tirés vers l’excellence. Je me jette fleurs Docteur, non ? Peut-être que mon âme, comme vous dites, ma musicalité, c’est d’être la synthèse des meilleurs systèmes cinématiques… À vrai dire, je ne sais pas. C’est une question difficile.
Docteur THW –> Difficile en effet, c’est pour cela que nous sommes là. Être l’égal, dans la perception populaire, d’un Fate, d’un Swade, d’une 5e, d’un Gurps ou d’un Gumshoe, autant de moteurs qui ont fait de leur nom une réelle plus-value, une marque, n’est pas donné à tout le monde. Et, sur ce chemin, Modiphius ne vous facilite pas la vie. Votre logo 2d20 n’apparait pas sur les licences dont ils ne sont pas titulaires. Or, ce sont leurs plus grosses locomotives, pour reprendre l’idée des wagons ; au moins pour deux d’entre elles : Fallout et Start trek. On remarquera également que Fate, Swade, Cypher system ou le D6 system possèdent un ouvrage professionnel uniquement consacré aux règles. Ce n’est pas le cas pour vous, sauf au travers d’un SRD sans illustration, à la maquette simple. Vous vous placez dans le paradigme du Year Zero Engine de Free League. Je m’explique : Fate, Swade, Genesys sont des locomotives, via leur core book, qui tire les wagons de leur univers. En un seul train finalement : le train qui porte le nom du moteur. Modiphius et Free League, à l’inverse, mettent sur les rails plusieurs jdrs, directement en tant que locomotive, avec un moteur partagé. Mais Free League a été plus malin via la licence d’utilisation de leur moteur ; licence qui est assez ouverte pour que l’on regarde finalement, sous le capot de leur jeu, la marque du moteur. Dans votre cas, le programme World Builder possède un esprit encore trop commercial, ou cadré, surtout après l’affaire de la licence D&D où le libre a été l’un des étendards de la guerre. Cela à du sens lorsqu’on lit bien le programme, je ne le nie pas. Mais cela ne tombe pas peut-être-il pas au bon moment après les échos de l’affaire OGL. Vous êtes finalement coincé entre ce programme de création sans succès, un éditeur qui promeut ses licences avant de promouvoir son moteur maison, des critiques sur la présentation des règles dans les jdrs de Modiphius, et comme corollaire, certes discutable, de système touffu anti-narratif. En conclusion, votre âme… préférons singularité, cela fera moins mystique ou ampoulé… est difficilement lisible. Mais, il y a des solutions pour vous redonner la foi. Je crois savoir qu’une VF du SRD est en préparation ; vous disposez d’un Facebook et d’un discord assez actifs ; Modiphius va peut-être corriger son programme « World Builder » ; peut-être nous sortir une nouvelle licence de poids comme du Elder Scroll par exemple ; peut-être encore proposer un core book 2d20 centré sur vous. Il y a des solutions, n’en doutez pas, qui finiront de tracer votre personnalité pour faire de vous la locomotive des productions et non la mécanique.
2d20 -> Ça fait beaucoup de « SI », Docteur…
Docteur THW –> On ne fait généralement pas un critique du premier coup, n’est-ce pas ? Bien notre séance s’achève. Nous avons avancé me semble-t-il sur un bon chemin. La prochaine fois, nous parlerons de vos différentes adaptations selon les Jdr qui font appel à vous. Cela sera, je crois, une bonne entrée pour affiner la perception de votre potentiel.
2d20 -> Faisons ça Docteur. À la prochaine séance donc…